Au Canada, le taux de chômage a atteint en décembre 2017 un creux record depuis 2008, se situant à 5,9 %[1]. Partout, on entend maintenant parler de plein emploi. Mais en réalité, qu’est-ce que le plein emploi? Quelles en sont les conséquences sur le marché du travail? Et surtout, sur l’emploi pour les personnes éloignées du marché du travail, comme celles qui vivent des défis en lien avec une condition physique, intellectuelle ou de santé mentale?
D’abord, la notion de plein emploi, selon un article de la Presse Canadienne dans Metro :
« C’est le taux de chômage en dessous duquel la rareté de main-d’œuvre a une influence à la hausse sur les salaires et un impact sur l’économie. En général, les économistes ne s’entendent pas sur un taux exact, mais selon Maurice Mazerolla de l’École de Management Ted Rogers de l’Université Ryerson, celui-ci se situerait quelque part entre 5 et 6 %. « Lorsque ce taux passe sous la barre des 6 %, les postes disponibles sont plus difficiles à combler et le taux d’abandon tend lui à augmenter, il y a beaucoup de mouvement, les employeurs trouvent difficile de conserver leurs employés parce que beaucoup d’autres options leur sont alors offertes.» [2]
Premier constat, donc, cela aurait entre autres pour effet de faire grimper les salaires. Ce que vient confirmer une récente étude de la Banque Nationale du Canada dans son bulletin « Nouvelles économiques » du 5 janvier 2018 : « Le salaire horaire a augmenté de 4.4 % en rythme annualisé corrigé des effets saisonniers ces six derniers mois, son meilleur résultat en plus de deux ans. »[3]
On pourrait donc penser qu’une possibilité de salaire bonifié serait à l’avantage des personnes éloignées du marché du travail. Le faible taux de chômage pourrait aussi avoir des retombées positives en termes : de disponibilités d’emploi; de possibilités de travailler à temps partiel, un avantage pour certaines personnes vivant avec des défis physiques, intellectuels ou de santé mentale (en décembre, par exemple, la majorité des emplois créés étaient des emplois à temps partiel), ou encore de possibilités d’accommodement; les employeurs devant favoriser la rétention de personnel.
Mais attention, il s’agit de liens de cause à effet qui pourraient s’avérer trompeurs : par exemple, la baisse de décembre a eu peu d’incidence sur le taux de chômage des 15-24 ans, qui constituent une forte proportion de la clientèle éloignée du marché du travail (par exemple, chez SPHERE, les 15-25 ans constituent 46 % de notre clientèle). De plus, la baisse du taux de chômage s’est surtout concentrée dans le secteur des services, alors que des pertes d’emploi ont plutôt été constatées dans le secteur manufacturier.[1] Tous les secteurs, donc, ne sont pas touchés de la même façon non plus. Finalement, un faible taux de chômage pouvant avoir une incidence positive sur la hausse des salaires, il pourrait également avoir une incidence positive sur… l’inflation,[2] ce qui pourrait venir gruger les acquis salariaux.
Bref, il importe de prendre du recul sur la situation de plein emploi et sur les retombées positives que nous pourrions anticiper pour les clientèles éloignées du marché du travail. L’accès à ces retombées pourrait peut-être ne pas être un lien de cause à effet direct pour cette clientèle. Cela reste à voir! Surveillons donc les prochains mois avec attention afin de faire profiter nos clients des opportunités qui pourraient s’offrir à eux, ou encore de les soutenir dans les défis que cela pourrait causer. Et puis, parce que d’autres facteurs, comme la possibilité de faire appel à une main-d’œuvre étrangère, pourraient aussi influer sur les retombées positives de la situation de plein emploi au Canada pour les personnes éloignées du marché du travail, misons encore et toujours sur la sensibilisation, la clé initiale pour convaincre les employeurs des bénéfices liés à l’embauche de personnel issu de ce bassin de main-d’œuvre!
Une collaboration de Caroline Pouliot, coordonnatrice aux communications, SPHERE.
[1] TRADING ECONOMICS (page consultée le 2 février 2018). « Canada Unemployment Rate », [en ligne], https://tradingeconomics.com/canada/unemployment-rate.
[2] CANADIAN PRESS (page consultée le 2 février 2018). Traduction libre tirée de l’article « The concept of full employment, and what it means for wages, explained », dans METRO, [en ligne], http://www.metronews.ca/news/canada/2017/09/08/the-concept-of-full-employment-and-what-it-means-for-wages-explained.html.
[3] BANQUE NATIONALE DU CANADA (page consultée le 2 février 2018). « Nouvelles économiques », [en ligne], https://www.bnc.ca/content/dam/bnc/fr/taux-et-analyses/analyse-economique/nouvelles-economiques-emploi.pdf.
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