Avez-vous déjà porté attention à la couverture médiatique relative à l’emploi et au handicap? Par son pouvoir de diffusion de masse, elle peut avoir comme effet d’inviter l’ensemble des citoyens à approfondir leurs réflexions sur les formules d’embauche de personnes en situation de handicap et d’entendre, ce qui est une bonne chose, plusieurs intervenants (employeurs, professionnels de l’intégration, organismes, etc.) à ce sujet. Mais dans ces reportages ou articles, certains mots utilisés pour parler d’intégration et de handicap peuvent parfois avoir un effet ambigu…

Le choix des mots

Par le choix des mots que l’on utilise, on donne souvent une couleur à notre discours, couleurs provenant souvent inconsciemment de notre façon de percevoir une réalité ou des représentations sociales que l’on se fait d’une situation :

« L’une des caractéristiques de la représentation sociale est son implication à la fois sociale et individuelle. Le social et l’individuel y sont interreliés. « Socialement produite, elle est fortement marquée par des valeurs correspondant au système socioidéologique et à l’histoire du groupe qui la véhicule, pour lequel elle constitue un élément essentiel de sa vision du monde » (Abric, 2003, p. 59). Les représentations sont sociales parce que (Moscovi, 1961, 1976; Jaspars et Fraser, 1984; Abric, 1987; Doise, 1986) : elles sont partagées par plusieurs individus, leur origine et leur mode d’élaboration sont sociaux et sont élaborées au cours de processus d’échanges et d’interactions, elles portent sur un objet social et elles remplissent la fonction sociale d’orienter les conduites et les communications sociales. »[i]

C’est vrai pour tout le monde. Partout. Toujours. Même pour celles et ceux qui travaillent avec les personnes en situation de handicap. Les représentations que l’on se fait d’une situation sont bien profondément ancrées. On peut par exemple avoir un discours très positif pour parler d’une personne ou d’une situation tout en parsemant ce dernier de mots qui, de par la représentation que l’on s’en fait, peuvent mettre l’accent sur un aspect plus négatif ou contradictoire du même discours que l’on veut positif.

Souffrant de… Malgré…

Depuis quelques années, l’appellation des personnes en situation de handicap a assez rapidement évolué : de personnes handicapées à personnes ayant des limitations fonctionnelles à personnes en situation de handicap, l’objectif étant de mettre l’accent sur la personne et non sur le handicap. Malgré la bonne volonté de tous et toutes, il se peut que les représentations sociales du mot handicap soient un peu plus lentes côté évolution. C’est pourquoi des relents de ces représentations se retrouvent encore souvent dans les différents discours.

Par exemple, dans la couverture médiatique sur l’emploi et les personnes handicapées, ou voit encore des titres ou segments d’articles tels : … les personnes souffrant d’un handicap intellectuelUne expérience d’embauche positive malgré le handicap des employés… Des mots qui peuvent sembler banal mais qui entretiennent encore et toujours une idée ayant une connotation négative dans un discours qui se veut positif.

Sans nier une réalité ou faire abstraction des difficultés que les personnes en situation de handicap peuvent rencontrer dans leur intégration en emploi, prendre conscience des mots utilisés avec nos différents interlocuteurs peut peut-être favoriser et accélérer la mise en place de représentations sociales plus positives de la réalité des personnes en situation de handicap.

Une collaboration de Éric Daigle, conseiller aux communications, SPHERE

[i] Centre-Ressources pour la Vie Autonome – Région Bas-Saint-Laurent Inc. Impact des représentations sociales sur l’emploi – Sommaire des résultats de la recherche, [en ligne], https://www.aqis-iqdi.qc.ca/docs/Impacts_representations_sociales.pdf (page consultée le 8 avril 2018).

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