(English will follow) – Une de mes amies qui est conseillère en emploi auprès de personnes qui vivent une problématique de santé mentale me rapportait l’autre jour ce qu’un employeur lui avait dit. Après la description du profil d’un participant qui souhaitait un emploi dans son entreprise, l’homme d’affaires lui avait répondu : « Tu sais, au fond, on a tous un p’tit quelque chose. »
Je trouve ça beau et vrai cette phrase-là, parce que ça sous-entend qu’on est tous concerné par la santé mentale. Pour ma part, je n’ai jamais vraiment cru le contraire. J’ai grandi dans un milieu familial où y’avait plutôt un gros quelque chose. Ensuite, j’ai étudié et je suis devenue intervenante en santé mentale durant plusieurs années auprès de personnes qui devaient faire un p’tit quelque chose pour reprendre le dessus, pour aller un p’tit peu mieux. Plusieurs de mes amis et de mes proches ont vécu ou vivent toujours une période pas évidente. Certains ont récolté un diagnostic au passage et prennent de la médication pour arriver à garder le cap. Moi-même, par moments, je me suis sentie plus fragile et vulnérable, des moments où je savais très clairement que je devais sérieusement prendre soin de moi si je ne voulais pas que mes difficultés deviennent une problématique.
Je ne me suis jamais pensée à l’abri et je crois que c’est une force d’être capable de le reconnaitre. Nous ne sommes pas des super-humains, surtout pas des robots. Même si parfois, on peut venir à penser que ce serait plus facile de ne pas vivre des émotions, pour arriver à performer comme notre société rationnelle nous presse de le faire.
L’autre jour, j’ai vu à la station de métro Rosemont un graffiti qui m’a fait beaucoup réfléchir. Ça disait : « Peux-tu remplacer ta peur de l’inconnu avec de la curiosité? ». Ceux qui pensent qu’ils sont invincibles et au-dessus de tout ça, ce sont eux qui me font peur. Ceux qui ne se remettent pas en question et qui disent que si tu feel pas, c’est de ta faute. Ceux qui ne sont pas capables de reconnaitre que ce qui leur fait peur de l’autre, c’est aussi en eux-mêmes. Ceux qui sont morts de trouille, au fond, de toucher à leur propre vulnérabilité. Pour ma part, je suis plus du genre à me trouver 2-3 maladies mentales durant les cours de psychopathologie, et je sais que je ne suis pas la seule.
Mais justement, nos p’tits travers, nos manies, nos folies passagères, ce n’est pas ça qui fait des humains des êtres aussi intrigants, particuliers, uniques et profondément beaux? Moi, les gens qui ont un p’tit quelque chose ne me font pas peur. Au contraire, ce sont eux ma gang. Bon, il faut dire que des fois, il y a des phases difficiles qui impliquent de la souffrance et du désespoir. Mais heureusement, la santé mentale, ce n’est pas quelque chose de figé dans le temps. C’est mouvant, ça fluctue et tôt ou tard, on recommencera à rire de bon cœur.
En cette journée mondiale de la santé mentale, je pense qu’il est important de se souvenir que la santé mentale, c’est l’affaire de tout le monde, oui, mais surtout, que ça commence par soi-même. Peu importe le fait qu’on ait un diagnostic ou non. Quand je prends soin de ma santé mentale, je pense qu’en quelque part, je prends soin de celle de l’autre. Je pense que ma capacité à me regarder aller, pour mieux me comprendre et savoir aller chercher ce dont j’ai besoin au fur et à mesure, me préserve d’aller mal et m’aide à passer au travers lorsque je vais moins bien. Quand je prends soin de moi, j’ai le sentiment que je prends soin de l’autre du même coup, parce que ça me rend plus apte à prendre soin de mes relations. Quand je m’accueille comme je suis réellement, je suis meilleure aussi pour accueillir le p’tit quelque chose de l’autre. Et si ça me fait peur, j’essaie de remplacer cela par de la curiosité.
Une collaboration d’Ève Dupuis, agente de projets, SPHERE.
Crédits photo: Claudia Martin.
A friend of mine who is an employment counselor for people experiencing mental health problems told me the other day what an employer had said. After hearing the profile description of a participant who wanted a job in his company, the businessman said, “You know, we all have a little something.”
I think the statement is beautiful and true because it implies that we are all concerned with mental health. Personally, I never knew anything else. I grew up in a family environment where there was rather a big something. Later, I studied and worked with people with mental health issues, who had a little something they had to overcome, to feel a little bit better. Many of my friends and my relatives lived or are still living with challenges. Some have been diagnosed along the way and take medication to stay functional. At times, I felt more fragile and vulnerable, moments where I knew clearly I had to seriously take care of myself if I didn’t want my difficulties to become problematic.
I never thought I was immune though and I think it’s a strength to admit it. We’re neither superhuman, nor robots especially. Although sometimes, you may begin to think it would be easier to not feel any emotion and perform like our rational society expects.
The other day I saw graffiti at the Rosemont Metro station that got me thinking. It read: “Can you replace your fear of the unknown with curiosity?” People who think they are invincible and above everything scare me. People who don’t question themselves and say that if you don’t feel, it’s your fault. Those who aren’t able to see what they fear in others is in themselves; those who are scared to death to go too deep and get in touch with their vulnerability. I’m more the type to find two to three of my own mental health issues during a psychopathology course. I know I’m not the only one.
However, it’s exactly the little flaws, habits, temporary insanity that makes human beings so intriguing, special, unique and deeply beautiful, isn’t it? Personally, people who have a little something don’t scare me. Rather, they’re part of my gang. Well, I must say that sometimes there are difficult periods involving suffering and despair. Fortunately, mental health isn’t static. It’s fluid, fluctuates and sooner or later, we’re able to laugh heartily again.
On World Mental Health Day, I think it’s important to remember that mental health is everyone’s business, yes, but above all, it starts with us, whether or not we have been diagnosed. When I take care of my mental health, I believe somehow, I’m taking care of someone else’s. I think my capacity for self-awareness, better self-understanding and knowledge of how to get what I need as I go about life protects me from unhealthiness and helps me care for myself when I’m less well. When I take care of myself, I feel I’m taking care of others at the same time, because I’m more apt to take care of my relationships. When I accept myself as I really am, I’m also better able to welcome other’s little something. And if it scares me, I try to replace it with curiosity.
In collaboration with Ève Dupuis, Project Officer, SPHERE.
Photo Credits: Claudia Martin