C’est lors d’une soirée reconnaissance visant à rendre hommage à ses participants le 6 février dernier que SPHERE-Québec (Soutien à la personne handicapée en route vers l’emploi) a présenté les retombées économiques et sociales d’un modèle innovateur de formation adaptée visant l’intégration et le maintien en emploi de personnes vivant avec des limitations. Le secteur ciblé : l’alimentation, pour lequel les besoins d’une main-d’œuvre stable sont actuellement criants.
Le projet a été développé sur mesure suivant les besoins exprimés par huit marchés d’alimentation de la région de Québec sous quatre grandes bannières (Provigo, IGA, Metro et L’Intermarché). Il totalise pour SPHERE-Québec un investissement de près de 60 000 $, provenant du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds d’intégration pour les personnes handicapées qui vise à améliorer les possibilités d’emploi pour les Canadiens handicapés dans le cadre d’efforts continus pour créer une main-d’œuvre plus productive et une économie plus vigoureuse. À terme, il aura permis à 9 jeunes vivant avec des limitations d’être formés, de vivre une expérience de travail, et d’intégrer le marché de l’emploi en tant que commis en alimentation. Cela représente environ 6 000 $ par intégration, une somme relativement peu élevée si l’on tient compte des retombées économiques et sociales que l’initiative apportera à long terme à chaque participant et employeur.
Lyne Vincent, coordonnatrice du développement chez SPHERE-Québec, explique que « la clé pour le succès de ce type de projet est d’adapter tous les paramètres, à partir du recrutement en passant par la formation, les stages et l’embauche, non seulement en fonction des besoins des employeurs, mais aussi des limitations de chaque candidat ». C’est d’ailleurs grâce à la collaboration de partenaires locaux tels que le Centre de Formation de l’Alimentation et du Commerce du Québec (CFACQ), le Centre de réadaptation en déficience intellectuelle (CRDI) de Québec ainsi que l’organisme ÉquiTravail que les objectifs ont été atteints.
Comptant plus de 1100 établissements dans la région de la Capitale-Nationale offrant 20 % des emplois commerciaux de la région[1], le secteur du commerce de détail en alimentation comporte des défis majeurs en termes d’attraction et de rétention de main-d’œuvre. À eux seuls, les taux de roulement peuvent avoisiner les 300 % pour des postes de caissier, emballeur et commis[2]. Pour Valérie Robert, coordonnatrice adjointe au CFACQ, un changement de vision relativement à l’embauche s’impose de lui-même. Des projets comme celui-ci viennent offrir une perspective réjouissante pour plusieurs marchés en pénurie de main-d’œuvre. « Pour le CFACQ, adapter une formation pour aller recruter dans des bassins de main-d’œuvre disponibles, mais souvent oubliés, était oui, d’abord, une responsabilité sociale, mais avec le marché de l’emploi actuel, c’est également devenu une nécessité».
Selon Marie-Lou Gallichan, intervenante psychosociale chez SPHERE-Québec responsable du projet, « lorsqu’on sait que la main-d’œuvre dite éloignée du marché du travail, qui vit avec des limitations de divers types face à l’emploi, est en augmentation constante, le lien se fait rapidement. On n’a qu’à penser à la hausse fulgurante du nombre d’individus vivant avec un TSA ou trouble du spectre de l’autisme, qui double tous les quatre ans, pour se rendre compte que nous nous devons de changer nos façons de faire et de voir les choses en matière d’intégration en emploi ». [3]
En raison de son succès et à la demande des employeurs, c’est la deuxième fois que le projet est réalisé dans la région de Québec. Et les employeurs ont tout à y gagner. En effet, les études démontrent que 90 % des personnes vivant avec des limitations ont un rendement égal ou supérieur à la moyenne[4]. De plus, parce qu’ils sont valorisés en emploi et formés spécifiquement selon les critères de l’employeur, les candidats issus de formations adaptées offrent un meilleur taux de rétention en emploi. François Ritchie, directeur général du IGA des Sources de Cap-Rouge, ajoute que « pour un employeur, c’est très rentable de participer à une mesure comme celle-là, parce que ça donne un gain de productivité au niveau de la formation et de l’encadrement des employés ».
Visionnez l’expérience du IGA des Sources de Cap-Rouge.sur la chaîne YouTube de SPHERE-Québec.
[1] Comité sectoriel de main-d’œuvre du commerce de l’alimentation (CSMOCA). « Portrait de l’industrie, région de la Capitale-Nationale ». En ligne. http://bit.ly/1w5XBjN
[2] Petit, Marie-Pier. Morissette, Lucie. Bourhis, Anne. « Portrait du secteur des magasins d’alimentation au Québec ». P. 12. 2014. En ligne. http://bit.ly/1xZWMx4
[3] Pour plus d’information, ministère de l’Éducation, du Loisir et du Sport dans Loiseux, Manon. « Portrait épidémiologique des TED chez les enfants du Québec ». Fédération québécoise de l’autisme. En ligne. http://bit.ly/1tTDNG7
[4] Gouvernement du Canada, Groupe de travail spécial sur les possibilités d’emploi des personnes handicapées. « Repenser l’incapacité dans le secteur privé ». 2013. En ligne. http://bit.ly/1I3h2Cg